Un petit gamin enfant des faubourgs Sur les Grands Boul'vards et les plac's publiques Venait, aux passants, offrir tous les jours Un modeste lot de jouets mécaniques C'étaient des soldats peints et chamarés De toutes les arm's et de tous les grades Faisant manœuvrer leurs sabres dorés dorés Militairement comme à la parade Et le gamin adorait ses joujoux Presqu'à la folie Mais il devait hélàs les vendre tous Pour gagner sa vie Et chaque fois que l'un d'eux s'en allait Ô douleur attroce Un long sanglot en silence gonflait Son cœur de gosse Mais son préféré parmi ces soldats Un bel officier hussard de la garde Etant le plus cher, ne se vendait pas Au moins celui-là, pensait-il, je l'garde Lorsqu'un jeune enfant richement vêtu Remarquant un jour le petit homm' d'armes Vint pour l'acheter offrir un écu Le pauvr' gosse alors fondit tout en larmes Pourquoi pleurer ? fit l'autre enfant très doux D'un air de surprise C'est que tu prends, dit-il, mon seul joujou Et mon cœur se brise L'autre bambin reprit alors ému Et l'âme très bonne Je te l'achète et puis ... ne pleur' plus Je te le donne Et depuis c'moment ce furent deux amis Le voyant chaqu' jour dans les promenades Tout comme deux frèr's tendrement unis Partageant leurs jeux en bon camarades. Mais au p'tit cam'lot voilà qu'un matin On vint apporter la nouvelle affreuse Que son compagnon était mort soudain Emporté la nuit par la grand' faucheuse Il prit alors son joujou, son hussard, Son idole chère, Puis il s'en fut le porter l'œil hagard Sur la blanche pierre Et se penchant contre la tombe il dit D'une voix étrange : Emporte le pour jouer au paradis Avec les anges.